La droite et la social-démocratie, porte-parole du capital, sont déterminées à imposer à leurs peuples les différents plans d'austérité. En Grèce, même l'extrême droite est appelée à la rescousse ! Les gouvernements qui n'exécutent pas avec zèle et brutalité les décisions des marchés financiers sont promptement et impitoyablement remplacés. La dictature du capital opère désormais au grand jour.Les peuples européens, les uns après les autres, sont ainsi appauvris, humiliés et méprisés par une horde de spéculateurs sans foi ni loi.
Sarkozy et Merkel «convoquent» le premier ministre grec, «socialiste», à Cannes avant le sommet du G20 pour avoir songé un moment àconsulter son peuple. Et pour le punir de cette étrange idée, on l'a sommé de démissionner et de former dans les plus brefs délais un gouvernement avec la droite. C'est exactement ce qu'il a fait. Et dès le 11 novembre, le nouveau gouvernement grec, dirigé par Lucas Papademos ancien vice-président de la BCE,était prêt pour appliquer les ordres des marchés financiers. Il est composé du Pasok («socialistes»), de la Nouvelle Démocratie (principal parti de droite) et du Laos (extrême droite). Tout va très vite. Il y a trop de milliards en jeu. Aujourd'hui on fait appel à l'extrême droite pour accélérer l'exécution des plans d'austérité. Demain on fera peut-être appel à l'armée si par malheur le peuple relève la tête et refuse de se soumettre au despotisme des marchés. Sociaux-démocrates, conservateurs et extrême droite sont ainsi unis dans un même élan contre le peuple grec!
Les agences de notation, elles, continuent à noter, à juger et à distribuer des avertissements aux gouvernements qui s'écartent de leurs dogmes. Leur alphabet est tellement réduit, comme leur vision économique, qu'il ne contient que quatre lettres : A, B, C et D. Tout le génie des peuples est ainsi réduit à ces lettres accordées avec beaucoup de mépris et d'arrogance en fonction uniquement et strictement des intérêts des plus riches.
Les médias, à l'unisson, répètent à longueur de journée et de nuit «qu'il n' y a pas d'autres choix économiques que la rigueur». Leur discours, pour paraphraser Orwell, est construit d'une manière telle que le mensonge le plus grossier paraît véridique.
Les places financières paniquent dès qu'on leur parle des peuples, de la démocratie etc. et applaudissent lorsque de nouveaux plans d'austérité sont adoptés.
Les experts et les économistes expliquent aux peuples, qui ne comprennent pas toujours, les subtilités et les vertus des différents plan d'austérité. La prospérité, expliquent-ils, passe nécessairement par la réduction des déficits et des dépenses publics. Il n' y a aucune autre alternative possible à l'austérité. C'est une loi naturelle comme la fougère qui pousse dans les bois.
Seul le pape n'est pas encore intervenu ! Il le fera certainement dans une prochaine homélie qui apaisera la conscience des peuples et les soulagera du fardeau de l'inévitable austérité.
François Fillon, premier ministre de Sarkozy, va appliquer à la lettre cette fameuse «loi naturelle», tout droit sortie du cerveau de la bourgeoisie. Lundi 7 novembre 2011, il a présenté un énième plan d'austérité qui nécessitera un «effort supplémentaire de 65 milliards d'euros (...) pour arriver à 0 déficit en 2016» et pour plaire aux agences de notation. Mais celles-ci comme les marchés financiers, la Commission européenne etc. sont insatiables. elles se nourrissent, à l'instar des vampires, du sang des peuples. Plus elles en pompent, et mieux elles se portent !
Christine Lagarde, directrice du FMI, est furieuse contre Silvio Berlusconi qui manque selon elle«de crédibilité» dans l'exécution des ordres de la Troïka (FMI, BCE, CE). L'Italie sera désormais surveillée par «la police économique» tous les trois mois . Il s'agit de protéger le peuple italien de la contagion de la crise grecque et de soumettre l'Italie «au testde la réalité», celle des marchés financiers évidemment (1). Silvio Berlusconi, l'homme de tous les scandales, le misogyne, le raciste admiré par toute la bourgeoisie européenne est devenu subitement sinon l'homme à abattre du moins à chasserdu pouvoir. Le «Cavaliere» est tombé à son tour quelques jours seulement après les déclarations de la Troïka c'est à dire le 12 novembre 2011. Son successeur Mario Monti est un ancien commissaire européen au Marché intérieur d'abord et à la Concurrence ensuite !
Georges Papandréou et Silvio Berlusconi, deux dirigeants européens sont tombés non pas par le verdict des urnes, ou comme en Tunisie et en Égypte par un soulèvement populaire, mais par la seule volonté des marchés financiers et de leurs représentants. Ces deux pays sont ainsi gouvernés par des technocrates directement installés par des spéculateurs sans scrupules. C'est la démocratie ou, ce qui revient au même, la dictature du capital ! Malgré le masque de la démocratie, le vrai visage de la bourgeoisie apparaît de plus en plus au grand jour, hideux et répugnant.
En Espagne, José Luis Zapatero, l'autre dirigeant «socialiste», après avoir ruiné l'économie de son pays, à coup de plans de rigueur et d'austérité, a préféré passer la main en organisant des élections législatives anticipées (20 novembre 2011) pour permettre à la droite de continuer cette œuvre de destruction massive et de mettre à terre ce qui reste encore debout de l'économie espagnole.
Mais cette prospérité tant promise par les gouvernements, agences de notation, marchés financiers, FMI, BCE, Commission Européenne etc., les peuples l'attendent toujours. La Commission européenne prévoit dans ses dernières publications un sombre avenir pour l'Europe : «la croissance s'est arrêtée en Europe et nous pourrions connaître une nouvelle phase de récession», a prévenu le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Olli Rehn (2). Angela Merkel estime qu'il faudrait encore à l'Europe une décennie pour sortir de la crise !
En attendant l'opulence qui surgirait un jour de l'austérité, c'est plutôt la misère qui ronge le quotidien des peuples. En Espagne et en Grèce on parle même de la grande misère. La soupe populaire a fait son apparition en Grèce. Des milliers et des milliers de citoyens grecs, frappés de plein fouet par le chômage de masse et la précarité conséquences directes des plans de rigueur et d'austérité, n'ont que ce moyen humiliant pour se nourrir. Ici les salaires ne cessent de baisser, comme le nombre de fonctionnaires, comme les différentes allocations, les pensions de retraite etc. Le taux de suicide, selon le gouvernement grec, a augmenté de 40 % les six premiers mois de 2011 par rapport à la même période de 2010 (3). En Espagne cinq millions d'hommes et de femmes sont déjà sans emploi dont deux millions ne touchent aucune indemnité. Quasiment la moitié des actifs de moins de 24 ans sont au chômage. On compte 1,4 millions de familles où les deux parents sont sans travail. Les files d'attente des malades s'allongent de plus en plus dans les couloirs des hôpitaux. La situation n'est guère meilleure en Italie, au Portugal, au Royaume Unis, en France, en Irlande etc. La faillite de l'Union européenne, de sa politique économique et de ses institutions politiques est totale. Et la crise est loin d'être terminée; car elle est intimement liée au capitalisme lui-même.
La bourgeoisie européenne aveuglée par son arrogance et son despotisme ne voit dans les peuples qu'une masse infâme dépouillée de toute dignité et vidée de toute humanité. Les peuples notamment les travailleurs n'existent, pour elle, que pour produire sans trêve, quand elle en a besoin, du profit. Mais elle oublie un peu vite que ce sont justement ces peuples, qu'elle méprise tant, qui font l'histoire. Son système de production en déliquescence qui engendre tant de malheurs, produit en même temps les conditions de sa propre disparition. Seule l'union de tous les travailleurs et de tous les peuples d'Europe peut précipiter le renversement du monde absurde de la bourgeoisie.
Mohamed Belaali
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(1) Le Monde du 6/7 novembre 2011 page 12