8 mars 2016
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De la répression du mouvement ouvrier à la soumission aveugle aux forces du capital en passant par l'état d'urgence permanent, la France vit une sale époque. De l’État de droit à l’État de police, la France se dirige, consciemment ou non, vers un système autoritaire dans lequel la population n'aura ni liberté ni sécurité. Le Chômage de masse n'est que l'aspect visible d'une situation économique et sociale désastreuse. La misère matérielle et morale, conséquence directe d'une politique économique d'austérité voulue et imposée par la classe dirigeante, touche une large part de la population. La richesse se concentre de plus en plus entre les mains d'une minorité sans foi ni loi. Les classes populaires sont paupérisées, humiliées, méprisées et par-dessus le marché manipulées par une classe inconséquente aveuglée par son arrogance et son despotisme.
Hollande et Valls, serviles serviteurs des puissants et dont la tactique et la stratégie politiques se réduisent à plaire à la bourgeoisie pour se maintenir au pouvoir, appliquent avec un zèle singulier une politique économique entièrement dédiée aux industriels, banquiers, financiers et autres spéculateurs. Des milliards et des milliards d'euros, puisés dans les deniers publics, sont ainsi offerts aux chefs d'entreprises, aux Pigeons(1) et autres Bonnets rouges pour ... créer des emplois ! Mais ces offrandes aux patrons, petits et grands, n'ont nullement empêché le chômage et la précarité de poursuivre leur fulgurante ascension et battre tous les records. Le nombre de chômeurs, toutes catégories confondues, dépasse les six millions (6 110 000 dans la France entière) (2) et celui des précaires, les trois millions (3 182 000 exactement) (3). Une nouvelle forme de précarisation extrême comme l'uberisation de l'emploi ou le contrat zéro heure se développent, hélas, de plus en plus.
Aucune perspective d'amélioration de la situation économique ne se profile à l'horizon. Les bourgeoisies européennes sont déterminées à faire appliquer par leurs gouvernements respectifs des politiques de «rigueur et d'austérité» qui ne font qu'appauvrir l'immense majorité de la population et enrichir une petite minorité d'exploiteurs. De nouveaux plans d'austérité plus durs et plus sauvages encore vont succéder aux anciens, jetant toujours plus d'hommes et de femmes dans le chômage et la précarité. Comme on le voit, les classes dirigeantes n'ont rien d'autre à offrir aux travailleurs que le désarroi et la misère.
En organisant ce gigantesque transfert de richesses du travail vers le capital, les classes dominantes préparent en même temps d'autres crises plus violentes et plus imprévisibles. Alors que les conséquences de la crise de 2007 sont toujours présentes, le spectre d'une nouvelle dépression étend son ombre sur le monde. L'angoisse s'empare à nouveau des banques et des tensions palpables agitent les marchés. Le système financier global est de plus en plus sous pression, comme le souligne le FMI porte-parole du capital : «Les problèmes hérités des turbulences passées amplifient ces tensions, d’où une aggravation des risques pesant sur la stabilité financière» (4). D'autres facteurs comme la chute des prix du pétrole et des matières premières, le ralentissement de la croissance chinoise, le niveau gigantesque de l'endettement, les bulles spéculatives, les licenciements massifs opérés par les grandes multinationales etc. ne font que préparer les conditions d'une nouvelle crise. Même si le capitalisme possède des capacités extraordinaires d'adaptation, il devient de plus en plus un obstacle au développent de la production et un frein au progrès économique, social et politique. L'avenir reste donc sombre, d'autant plus sombre que cette situation attise les tensions géopolitiques et exacerbe les luttes d'intérêt, précipitant le monde dans le chaos et les guerres.
Incapable de combattre le chômage et la misère qui s'installent durablement en France, Hollande bat les tambours de la guerre et mobilise toute la nation derrière lui pour… «lutter contre le terrorisme»! Le guerrier Hollande envoie ainsi l'armée au Mali, en Irak, en Syrie et mène aujourd'hui des opérations militaires plus ou moins secrètes en Libye pour livrer la guerre à un ennemi qu'il a, avec ses prédécesseurs, largement contribué à créer ! La guerre est déclarée non pas contre son adversaire, le despotisme du « monde de la finance» , comme il le disait lui-même (5), mais contre les attentats terroristes. Belle manière pour occulter la faillite de sa politique économique et détourner les masses populaires des vrais combats et des vrais problèmes : chômage de masse, précarité de l'emploi, disparition progressive des acquis sociaux etc. La guerre que la classe dirigeante mène à l'extérieur n'est que le prolongement de celle livrée à l'intérieur contre les salariés en général et les travailleurs en particulier.
Le mépris de Hollande et de Valls pour la classe ouvrière n'a d'égal que leur soumission aux patrons. C'est sous leur règne que des ouvriers sont condamnés à de la prison ferme pour avoir défendu leurs emplois. Hollande et Valls, à travers leurs procureurs, ont décidé de punir les salariés de Goodyear alors même que la direction et les deux cadres séquestrés avaient retiré leur plainte ! Le procès s'est donc déroulé sans plaignant ! Rappelons que les salariés de cette multinationale américaine mènent depuis 2007 des luttes dures et ininterrompues contre les plans de licenciement de Goodyear Tire. Le 31 janvier 2013 la direction annonce la fermeture de l'usine d'Amiens-Nord supprimant du même coup 1143 emplois ! Seulement 120 des «ex-goodyear » ont trouvé un CDI, 12 sont décédés et 3 se sont suicidés (6). Et comme si ce drame ne suffisait pas, le procureur de la République voulait, vaille que vaille, jeter les travailleurs les plus combatifs en prison. Précisons que les procureurs de la République sont des magistrats nommés par décret du président de la République et placés «sous l'autorité du garde des sceaux, ministre de la justice» (7). Ils sont donc directement dépendants du pouvoir politique c'est-à-dire de Hollande et de Valls. C'est une trahison historique.
Mais la condamnation des « ex-goodyear» n'est que l'arbre qui cache la forêt. Car brutalité patronale et résistance ouvrière vont de pair. Les séquestrations, occupations d'usines, grèves et autres manifestations se succèdent et se développent au rythme des licenciements et des fermetures de sites : capital contre travail, exploiteurs contre exploités, profit contre salaire, violence sociale ouvrière contre violence sociale patronale. Seulement la violence patronale est masquée, invisible, alors que la lutte des salariés, elle, est montrée, médiatisée et de surcroît rendue illégale. Il suffit de se rappeler l'hystérie des médias bourgeois concernant «la chemise déchirée » dans le conflit d'Air France pour s'en convaincre. D'un côté les images de deux cadres avec chemises déchirées qui ont fait le tour du monde, de l'autre un silence assourdissant sur les 2 900 licenciements prévus par la direction d'Air France ; c'est que «la lutte des classe ça déchire» ! (8).
Hollande et Valls ne se contentent pas de criminaliser les luttes ouvrières. Ce sont deux hommes politiques sans principes ni convictions. Leur seule préoccupation est de rester au pouvoir en s'agenouillant devant les puissants tout en méprisant les travailleurs. Ils comptent en ce moment engager «une réforme» qui va bouleverser de fond en comble le code du travail. Ils sont déterminés à détruire un siècle d'avancées sociales arrachées de haute lutte par des générations successives de travailleurs. En vidant le code du travail de sa substance, ils cherchent, au profit du patronat, à venir à bout de l'essentiel des acquis sociaux. Cette nouvelle attaque a pour ultime objectif de réduire le salaire à sa limite la plus basse pour un profit le plus élevé. Elle s'inscrit parfaitement dans cette tendance générale de la production capitaliste contre laquelle les travailleurs doivent s'élever en permanence s'ils ne veulent pas être ravalés au rang d' esclaves.
Cette régression sociale généralisée est grandement facilitée et accentuée par l'instauration de l'état d'urgence voulu par le gouvernement dans le cadre de sa «guerre contre le terrorisme». Car pour que les «réformes» passent, il faut surveiller, ficher et réprimer : «L'instrumentalisation du terrorisme par la classe dirigeante permet de museler et d'étouffer toute opposition, toute critique et toute résistance à sa politique de classe» (10).
L'état d'urgence permet également au président de la République et à son premier ministre de promulguer des lois liberticides accordant d'immenses pouvoirs à l'appareil répressif ouvrant ainsi la porte à toutes les dérives, à tous les dérapages et à tous les abus. Le pouvoir, par exemple, peut désormais ordonner des perquisitions de jour comme de nuit, assigner à résidence les citoyens, de préférence musulmans, sans aucun contrôle judiciaire. Combien d'enfants ont été traumatisés et violentés, de citoyens brutalisés et humiliés pour rien lors des perquisitions ? (11). Les Nations Unies, le Conseil de l'Europe et les organisations de défense des droits de l'homme (12) ont tous condamné ces dérives.
Ce régime d'exception risque, comme l'expérience nous l'enseigne, de devenir la règle, de se banaliser avec toutes les conséquences sur les libertés individuelles et collectives. L'état d'urgence a déjà été prolongé deux fois et le gouvernement tente d'entretenir un climat de peur pour légitimer le maintien, sous une forme ou sous une autre, de cet état d'urgence :«Il ne faut aujourd’hui rien exclure et je le dis avec toutes les précautions qui s’imposent, mais nous le savons et nous l’avons à l’esprit, il peut y avoir aussi le risque d’armes chimiques et bactériologiques» disait Manuel Valls (13). La France glisse ainsi lentement vers un régime où la police et l'appareil répressif en général auront des pouvoirs exorbitants. Le citoyen sera enserré par un État omniprésent et omnipotent qui, comme les tentacules d’une pieuvre géante, l’étouffe.
Malgré cette triste période toute peinte de noir, le combat se poursuit. Car il est le produit des injustices, du despotisme et de l'arrogance des puissants. Malgré les défaites, les humiliations, les souffrances, les luttes se renouvellent en permanence. C'est un éternel recommencement et comme disait Max-pol Fouchet :«Les barricades s'écroulent, mais pour se relever, pour renaître, comme les vagues de la mer». Hollande et Valls ne sont que des marionnettes entre les mains d'une classe sociale qui a fait son temps mais qui possède encore tous les pouvoirs. De crise en crise, son système de production prépare les conditions matérielles d'une transformation radicale de la société. Les travailleurs, producteurs de richesses, doivent unir leurs forces pour hâter sa disparition et pour leur émancipation définitive.
Mohamed Belaali
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- Mouvement des patrons de PME qui contestaient notamment l'augmentation des cotisations et des taxes sur les plus-values en cas de revente d'entreprises. Le gouvernement a cédé rapidement à leur revendications.