«Pourquoi ai-je attendu ce jour pour le dire,
vieilli, et de ma dernière encre :
La puissance atomique d'Israël menace
une paix du monde déjà fragile ? (…)
parce que je suis las de l'hypocrisie de l'Occident».
Ainsi s'exprimait Günter Grass prix Nobel de littérature dans un poème publié en avril 2012 par le quotidien Süddeutsche Zeitung (1). Günter Grass n'annonce en fait rien de nouveau en affirmant courageusement que l'État sioniste d'Israël, soutenu aveuglément par l'impérialisme américain et européen, menace la paix du monde.
Les puissances oppressives occidentales et le sionisme politique ont ensemble enfanté un monstre qui ne cesse de grandir et menace la paix dans le monde. Le comportement barbare et bestial du gouvernement israélien à Gaza (plus de 20 000 morts dont une majorité de femmes et d'enfants) montre le vrai visage de l'Etat sioniste et de la «civilisation» capitaliste. Günter Grass avait raison de s'inquiéter du danger que représente l'Etat d'Israël et de l'hypocrisie de l'occident capitaliste. Avant lui, Albert Einstein, Hannah Arendt et bien d'autres personnalités juives dénonçaient déjà en 1948 le «Parti de la liberté», ancêtre du Likoud dont Netanyahou est l'héritier, car «très proche des partis nazis et fascistes par son organisation, ses méthodes, sa philosophie politique et son attrait social»(2).
Il faut rappeler pour mémoire que dès le premier tiers du XIXe siècle, le Royaume-Uni développait déjà l'idée de créer un «foyer juif en Palestine» pour servir ses propres intérêts stratégiques (3). Le sionisme politique a grandi et prospéré sous l'aile protectrice de l'impérialisme britannique, puissance économique et coloniale de l'époque. L'antisémitisme européen, le génocide nazi, le mépris des arabes palestiniens ont grandement contribué au développement du sionisme qui n'était, jusqu'à la déclaration Balfour (1917), qu'un mouvement politique minoritaire chez les juifs. Chaïm Weizmann, premier président de l'État d'Israël, écrivait dans ses mémoires : «Il était toujours plus facile de parler à cœur ouvert aux non-juifs qu'aux juifs occidentaux; il y avait moins de chance d'être mal compris»(4). Ce sont les intérêts économiques et stratégiques donc de l'Angleterre et, partant, de la bourgeoisie anglaise qui sont, tout du moins au début, derrière le fait colonial israélien et ce qu'il est devenu aujourd'hui c'est-à-dire un véritable danger non seulement pour les peuples de cette région «bourrée» de pétrole, mais pour le monde entier.
Israël est un État au-dessus de tous les États. Il est aussi au-dessus des lois, des conventions et de toutes les résolutions des Nations Unies. Israël a trop de pouvoir grâce aux soutiens inconditionnels des Etats-Unis et de l'Europe. Il ne supporte ni contradiction, ni critique. Toute contestation, toute opposition et toute dénonciation de l'entité sioniste aussi minime soit-elle est impitoyablement réprimée et l'antisionisme se confond désormais avec l'antisémitisme.
Aujourd'hui plus qu'hier encore, l'accusation de l'antisémitisme est devenue l'arme fatale. Derrière chaque critique de l'Etat d'Israël se cache un antisémite! Il faut vaille que vaille soutenir Israël. Au nom de cet Etat, on étouffe toute velléité et toute possibilité d'exprimer librement une pensée différente. La liste de militants et militantes, de penseurs, de poètes, d'artistes, d'universitaires, de journalistes, d'hommes et de femmes politiques, accusés d'antisémitisme est impressionnante. Même l'extrême droite profondément antisémite, devenue aujourd'hui amie de Netanyahou, utilise elle aussi l'antisémitisme comme arme contre ses adversaires progressistes et antiracistes. Donald Trump, Viktor Orban, Mattéo Salvini, Javier Milei, Geert Wilders, Marine Le Pen, Eric Zemmour etc. sont parmi les plus fervents défenseurs de l'Etat hébreu et n'hésitent pas à coller l'étiquette d'antisémite sur le front de toutes celles et ceux qui critiquent le gouvernement d'Israël. Le musulman remplace aujourd'hui le juif d'hier qu'elle a tant haï et persécuté.
L'autre machine de guerre du sionisme est le terrorisme. La raison, la critique, doivent entrer en sommeil. Seule compte la soumission totale à l'union sacrée contre le terrorisme. La résistance à la politique de l'Etat d'Israël est systématiquement qualifiée de terrorisme. Même si la résistance à l'occupant est un droit naturel reconnu par les Nations Unies, le peuple palestinien est réduit à des «bandes de terroristes» qui menacent l'existence même d'Israël ! Cette obstination à taire toute critique de l'entité sioniste ne peut s'expliquer que par cette farouche volonté d'escamoter l'histoire de la Palestine et les crimes perpétrés hier et aujourd'hui par Israël avec la complicité absolue des Etats-Unis et de l'Europe contre le peuple palestinien. Les massacres d’Israël se font «dans les murmures ou dans un silence total (...)» écrivait Jean Genet dans «Quatre heures à Chatila» (5).
Les peuples et en particulier les travailleurs n'ont nul besoin des guerres et des bombes. Ils ont besoin d'un monde débarrassé justement de l'impérialisme et du sionisme politique, ennemis du progrès et de la paix. L'impérialisme et le sionisme politique ont répandu la mort un peu partout et semé trop de malheurs sur cette terre. L'entente et la fraternité entre les peuples du monde entier sont une condition vitale pour mettre un terme à l'hégémonie impérialiste et son rejeton sioniste.
Mohamed Belaali
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(1)https://docs.google.com/file/d/0B8uZlrsvNCkKd3JReW1acEFVSzQ/edit?pli=1
(2)https://www.marxists.org/reference/archive/einstein/1948/12/02.htm
(3) Voir sur ce point, l'excellent livre de Lotfallah Soliman: «Pour une histoire profane de la Palestine». Éditions La Découverte, 1989.
(4) Weizmann Chaïm « Naissance d'Israël», Gallimard, Paris, 1957, page 183, cité par L. soliman, op.cit, page 26.
(5) Jean Genet, L’ennemi déclaré. Textes et entretiens. Gallimard. Page 243.