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13 mai 2021 4 13 /05 /mai /2021 09:26

Les morts, les blessés de Jérusalem-Est et les raids sur Gaza ne doivent pas faire oublier les massacres et les souffrances qu’Israël inflige aux palestiniens depuis sa création.

 

En 1948, Albert Einstein, Hannah Arendt et plusieurs personnalités juives dénonçaient déjà Menahem Begin et le massacre du village palestinien de Deir Yassin dans une lettre publiée par New York Times :

« Les aveux publics du parti de Begin ne sont aucunement un guide quant à son caractère réel. Aujourd'hui, ils parlent de liberté, de démocratie et d'anti-impérialisme, alors que jusqu'à récemment ils prêchaient ouvertement la doctrine de l'Etat fasciste (...) Un exemple choquant est leur comportement dans le village arabe de Deir Yassin. Ce village, à l'écart des routes principales et entouré de terres juives, n'avait pris aucune part à la guerre, et avait même combattu les bandes arabes qui voulaient utiliser le village comme base. Le 9 avril (THE NEW YORK TIMES), des bandes terroristes ont attaqué ce village pacifique, qui n'était pas un objectif militaire dans les combats, ont tué la plupart de ses habitants 240 hommes, femmes et enfants et en ont gardé quelques-uns en vie pour défiler en captifs à travers les rues de Jérusalem (...) C'est dans ses actions que le parti terroriste trahit son caractère réel; à partir de ses actions passées, nous pouvons juger de ce que l'on peut attendre de lui dans le futur » (1) .

 

Effectivement en juin 1982, Menahem Begin, devenu premier ministre, et son ministre de la défense Ariel Sharon envahissent le Liban. Le jeudi 16 septembre les milices phalangistes pénètrent, avec l’aide de l’armée israélienne, les camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila. Les mots et les images auront certainement du mal à décrire ce qui s’est passé dans les deux camps durant les nuits de jeudi à vendredi et du vendredi à samedi.

Pourtant, un homme, poète et écrivain, a su rendre compte avec une grande précision des détails de ce que les kataëbes chrétiennes protégées par Tsahal ont laissé derrière elles : «la femme palestinienne était probablement âgée car elle avait des cheveux gris. Elle était étendue sur le dos, déposée ou laissée là sur des moellons, des briques, des barres de fer tordues, sans confort. D'abord j'ai été étonné par une étrange torsade de corde et d'étoffe qui allait d'un poignet à l'autre, tenant ainsi les deux bras écartés horizontaux, comme crucifiés. Le visage noir et gonflé, tourné vers le ciel, montrait une bouche ouverte, noire de mouches, avec des dents qui me semblèrent très blanches, visage qui paraissait, sans qu'un muscle ne bougeât, soit grimacer soit sourire ou hurler d'un hurlement silencieux et ininterrompu. Ses bas étaient en laine noire, la robe à fleurs roses et grises, légèrement retroussée ou trop courte, je ne sais pas, laissait voir le haut des mollets noirs et gonflés, toujours avec de délicates teintes mauves auxquelles répondaient un mauve et un violet semblable aux joues. Étaient-ce des ecchymoses ou le naturel effet du pourrissement au soleil ?». Voilà ce que Jean Genet écrivait dans « Quatre heures à Chatila » (2) .

Menahem Begin déclarait à la Knesset « A Chatila, à Sabra, des non-juifs ont massacré des non-juifs, en quoi cela nous concerne-t-il ?» (3)

M. Begin a raison. Israël n’est jamais concerné ni inquiété. C’est un Etat au-dessus de toutes les lois, conventions et autres résolutions. Ici seul le « droit » du plus fort s’applique.

 

Israël a tant de pouvoir qu'il peut commettre et faire passer tous ses massacres pour de la légitime défense ! Il a le soutien des Etats-Unis, de l’Europe et de tous les régimes arabes. Cela fait beaucoup pour le peuple palestinien qui est toujours sans Etat ni véritable territoire. Ce pouvoir, dans lequel s’enfonce Israël, risque de se retourner contre lui et l’engloutir.

 

Aujourd’hui encore, l’Etat d’Israël s’enlise dans la même logique, celle du crime et démontre à nouveau son mépris absolu pour la vie humaine : « Je suis écœurée par cette énième démonstration de barbarie et de violence de la part d’Israël, cette démonstration de mépris total pour la vie humaine, pour la dignité de la personne, pour le respect des droits les plus élémentaires des peuples. » écrivait Ishtar Cohen (4) .

 

Aujourd'hui, Benyamin Netanyahou poursuit « l’œuvre » accomplie hier par Menahem Begin et Ariel Sharon : tuer le plus de palestiniens possible qui représentent, pour eux, l’obstacle vivant au Grand Israël. Mais depuis 1948 la résistance palestinienne est toujours là comme la terre sur laquelle elle a grandi.

D’autres dirigeants israéliens viendront commettre à leur tour les massacres nécessaires au nom de ce « grand rêve ».

 

Israël poursuit donc et poursuivra méthodiquement et froidement son « œuvre». Ses crimes sont plus ou moins acceptés, plus ou moins justifiés, mais rarement dénoncés par les grands médias occidentaux. Les massacres d’Israël se font « dans les murmures ou dans le silence total ».

Les gouvernements successifs d’Israël, et ce depuis sa création, ont élevé les israéliens dans le mépris et la haine du palestinien.

 

Pourtant, les deux peuples ont vécu ensemble en paix des siècles durant. Leur amour pour cette terre de Palestine n’a d’équivalent que leur haine réciproque. Leurs proclamations d’indépendance montrent d’ailleurs, une étrange ressemblance :

« Eretz- Israël est le lieu où naquit le peuple juif. C’est là que se forma son caractère spirituel, religieux et national. C’est là qu’il réalisa son indépendance et créa une culture d’une portée à la fois nationale et universelle. » (Proclamation d’indépendance de l’Etat d’Israël, 15 mai 1948).

La déclaration des palestiniens commence ainsi : « Terre des messages divins révélés à l’humanité, la Palestine est le pays natal du peuple arabe palestinien. C’est là qu’il a grandi qu’il s’est développé et s’est épanoui » (Déclaration d’indépendance de l’Etat palestinien, 15 novembre 1988).

Le poète palestinien Mahmoud Darwish écrivait «  Nous souffrons d’un mal incurable qui s’appelle l’espoir. Espoir que nos poètes verront la beauté de la couleur rouge dans les roses plutôt que dans le sang. Espoir que cette terre retrouvera son nom original : terre d’amour et de paix ».

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.marxists.org/reference/archive/einstein/1948/12/02.htm

(2)Jean Genet, « L’ennemi déclaré ». Textes et entretiens. Gallimard. Page 243

(3)Ibid

(4) https://cybersolidaires.typepad.com/francophonie/2008/12/le-sang-de-gaza-est-entr%C3%A9-dans-ma-maison.html

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8 mai 2021 6 08 /05 /mai /2021 06:20

 

«C'est cette loi qui établit une corrélation fatale entre l'accumulation du capital et l'accumulation de la misère, de telle sorte qu'accumulation de richesse à un pôle, c'est égale accumulation de pauvreté, de souffrance, d'ignorance, d'abrutissement, de dégradation morale, d'esclavage, au pôle opposé, du côté de la classe qui produit le capital même». Karl Marx

 

 

La France, dans le cadre d'un capitalisme en crise, tend lentement vers un régime que personne ne sait encore comment qualifier. Mais peu importe les adjectifs et les qualificatifs. Tous les ingrédients d'une décomposition sociale, politique et morale sont bien présents : chômage, précarisation et ubérisation du travail, guerre contre toutes les avancées sociales, gestion criminelle de la pandémie, corruption d'une grande partie de la classe politique, menace publique de putsch, persécution des musulmans etc. etc.

Les associations caritatives et les banques alimentaires qui fleurissent un peu partout comme la misère d'ailleurs qui leur permet d’exister et de se développer sont un autre signe de cette régression sociale généralisée. Cette situation non seulement perdure, mais se dégrade encore de jour en jour. Et toute révolte d'envergure est impitoyablement réprimée. La répression sauvage et les châtiments corporels d'un autre âge infligés aux Gilets jaunes (mains arrachées, yeux crevés, visages défigurés, crânes fracassés etc.) en est un exemple éloquent et affreux à la fois. Car la richesse doit rester, vaille que vaille, concentrée entre les mains d'une seule et même classe sociale.

 

 

La France, pays riche, compte aujourd'hui des millions de smicards, de travailleurs pauvres,

d'esclaves modernes travaillant pour des plateformes comme Uber ou Deliveroo, de «sans-papiers» surexploités où « le temps de travail atteint son maximum et le taux de salaire son minimum », de chômeurs dont on ne cesse de diminuer les indemnités (1), bref des millions d'hommes et de femmes broyés par la machine capitaliste.

Pendant ce temps là et malgré la crise, « les dividendes distribués aux actionnaires des entreprises françaises du CAC40 ont littéralement explosé » (2). Les esclaves du capital par contre, eux, ne reçoivent que le strict minimum nécessaire à la reproduction de ces mêmes dividendes. Un système qui produit sans trêve richesse pour les uns et misère pour les autres ! Cette misère n'a d'égal que la richesse accumulée par une minorité de très riches (3) et qui aime de surcroît étaler ostensiblement son goût pour le luxe, l'apparat, le cérémonial... Car pour qu'une classe puisse vivre dans le luxe, il faut qu'une autre classe vive dans le dénuement et l'asservissement.

 

Les puissants, insatiables, se nourrissent toujours à l'instar des vampires, du sang du peuple des travailleurs.

 

De son côté, l’État organise à travers ses organismes, notamment ceux de la sécurité sociale, une véritable chasse aux fraudeurs des... prestations sociales (4) ! Il a même créé à cet effet le Répertoire National Commun de la Protection Sociale (RNCPS). Le contrôle porte sur les minima sociaux, le RSA (Revenu de solidarité active), le logement et beaucoup moins sur les cotisations patronales. Plus on est pauvre, plus on est contrôlé et plus on est sanctionné ! « Jamais les bénéficiaires d’aides sociales, et parmi eux les plus précaires, n’avaient été aussi rigoureusement surveillés, ni leurs illégalismes ou leurs erreurs si sévèrement sanctionnés » (5).

La traque se concentre donc sur les plus précaires, les plus pauvres, sur «les sans dents» comme disait François Hollande ou sur «les gens qui ne sont rien» selon Emmanuel Macron !

Si l'Etat s'acharne sur les pauvres, il reste en revanche très discret quant à l'évasion fiscale dont les montants sont sans commune mesure avec la fraude sociale (6). A intervalles réguliers, la presse nous apprend comment les grandes familles bourgeoises françaises comme les Mulliez, les Guerrand-Hermès ou encore Bernard Arnault, fraudent le fisc en planquant leurs milliards un peu partout à travers le monde (7).

L'État bienveillant avec les uns (fraude des riches), impitoyable avec les autres (fraude des pauvres) ! Rien de plus normal. l'Etat n'est en réalité « qu'un comité qui gère les affaires communes de la classe bourgeoise tout entière ».

 

La corruption des représentants de cette classe d'exploiteurs contraste lamentablement avec les valeurs proclamées par cette république bourgeoise et les pratiques réelles de ses dirigeants. Le nombre d'hommes politiques impliqués, à un degré ou à un autre, dans les affaires de corruption est impressionnant. Il est tout simplement impossible d'établir une quelconque liste exhaustive des scandales politico-financiers qui secouent régulièrement tous les échelons de l'Etat. A titre d'exemple seulement, on peut citer le cas de l'ancien président de la république Nicolas Sarkozy qui concentre à lui seul une demi-douzaine d'affaires entre ses mains : l'affaire Tapie, l'affaire Karachi, l'affaire Bettencourt, l'affaire libyenne, l'affaire des sondages et l'affaire des écoutes téléphoniques pour laquelle il vient d'être condamné.

 

Pour masquer cette cruelle réalité et éviter toute résistance et toute révolte d'envergure, la classe dirigeante invente des ennemis et montre du doigt le travailleur immigré, le musulman, le noir etc. comme responsables de tous les maux et de tous les malheurs de la France. La fabrication des boucs émissaires lui permet ainsi de décharger la colère populaire sur les victimes de la crise tout en occultant sa propre responsabilité dans cette situation désastreuse.

La bourgeoisie française instrumentalise également, dans une société vieillissante, la peur, en propageant, en encourageant et en banalisant un discours politique de plus en plus haineux, xénophobe et islamophobe. Les journalistes, les philosophes, les écrivains, les hommes et les femmes politiques nourris et engraissés par les grands patrons se précipitent et se succèdent sur les plateaux de télévision et les stations de radio pour déverser leur haine de classe sur une partie de la population.

Mais lorsque le conflit s'aiguise et prend de l'ampleur, la classe dominante n'a d'autres choix que d'utiliser la violence sous toutes ses formes pour perpétuer sa domination. L'exemple des Gilets jaunes en est la meilleure preuve. Leur Mouvement restera probablement dans les annales comme celui qui a été le plus réprimé dans l'histoire récente de la France (8).

 

Les esclaves modernes peuvent toujours améliorer leurs conditions de vie et de lutte par des combats ponctuels. Mais ils ne peuvent briser leurs chaînes et se libérer de l'exploitation, de l'oppression et de la misère matérielle et morale tant qu'ils n'ont pas réussi à abolir la source de leur malheur, le capitalisme et la classe qui le porte, la bourgeoisie.

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.mediapart.fr/journal/economie/030521/assurance-chomage-les-nouveaux-calculs-explosifs-de-l-unedi

(2)Voir Basta du 13 novembre 2020 «En vingt ans, les dividendes distribués aux actionnaires du

CAC40 ont augmenté de 269 % ».

(3)https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2020-rapport-isf-octobre.pdf

VOIR également :

https://www.forbes.fr/classements/classement-forbes-2021-des-milliardaires-lincroyable-annee-de-tous-les-records-pour-jeff-bezos-elon-musk-bernard-arnault/

(4)https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-09/20200908-rapport-Lutte-contre-fraudes-prestations-sociales_0.pdf

(5)Vincent Dubois : «Contrôler les assistés». Raisons d'agir, 2021.

(6)https://solidairesfinancespubliques.org/le-syndicat/media/presse/2786-la-fraude-fiscale-nuit-gravement-nouveau-rapport-du-syndicat-solidaires-finances-publiques.html

Voir également le rapport d'Oxfam :

https://www.oxfamfrance.org/inegalites-et-justice-fiscale/cac-40-la-grande-evasion-fiscale/

(7)https://www.francetvinfo.fr/economie/impots/paradis-fiscaux/paradis-fiscaux-on-vous-resume-openlux-ces-revelations-qui-epinglent-le-luxembourg-et-des-grandes-fortunes-francaises_4289725.html

(8)https://www.belaali.com/2019/11/gilets-jaunes-une-annee-de-combat-et-d-espoir.html

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15 avril 2021 4 15 /04 /avril /2021 06:10

Plus de cent mille personnes sont mortes du covid 19 en France (1) dans l'indifférence quasi générale. L'accumulation des morts, jour après jour, nous laisse insensibles et impuissants. Le gouvernement et les médias nous ont préparés et habitués à assister en spectateurs passifs à cette macabre comptabilité quotidienne. Ces dizaines de milliers de vies humaines disparues, ces morts sans visages sont ainsi réduits à de simples et abstraites statistiques. La vie des défunts, la souffrance de leurs proches s'effacent pour ainsi dire devant les chiffres égrenés au quotidien par les nouveaux croque-morts lors des «points sanitaires». Cette déshumanisation nous empêche du même coup de briser cette résignation et de se dresser contre un pouvoir dont la gestion criminelle est indirectement responsable de cette hécatombe. Car il fait passer les bénéfices des entreprises avant la santé et la vie de la population. Cyniquement Macron tentera par tous les moyens, pour mieux masquer sa responsabilité, de récupérer cette tragédie.

Ces cent mille morts disparus dans la solitude sont en quelque sorte le miroir d'une société marchande qui a perdu ses repères humains; il ne lui reste comme guide et comme horizon ultime que le profit. Derrière le Coronavirus qui tue, se cache un autre virus beaucoup plus mortel, le virus du profit.

 

 

La gestion de la pandémie par Macron est pour le moins chaotique : ni confinement véritable, ni campagne de vaccination digne de ce nom. Mais derrière cette impréparation, ces hésitations, ce tâtonnement, ces décisions contradictoires et ces mensonges, se cache une ferme volonté de sauver «quoi qu'il en coûte» l'économie c'est-à-dire le profit des entreprises au détriment de la santé et de la vie de la population (2). La santé pour ce pouvoir n'est qu'une marchandise, un vulgaire article de commerce qui se vend et s'achète sur le marché des soins. Il faut absolument que l'économie continue à tourner avec ou sans mesures de confinement. Bien que vous soyez confinés, il faut quand même aller travailler ! Résultat de cette vision et de cette gestion : 100 000 morts et plus de 5 millions de cas confirmés, plaçant ainsi la France parmi les pays les plus touchés au monde par le Coronavirus (3) ! Et le nombre de décès ainsi que celui des personnes infectées ne cesse, hélas, d'augmenter. Les hôpitaux, dans de nombreuses régions, sont débordés et le personnel soignant épuisé. Les places dans les services de réanimation commencent à manquer. Les opérations jugées non urgentes sont déprogrammées et les autres patients sont délaissés. Pourtant, Macron disait avec un certain cynisme «Nous sommes en guerre. Toute l’action du gouvernement et du Parlement doit être désormais tournée vers le combat contre l’épidémie, de jour comme de nuit» (4). Mais le «chef de guerre » capitule en rase campagne laissant ainsi le personnel soignant et leurs patients seuls et sans moyens de défense face à leur ennemi mortel, le Coronavirus.

 

C'est dans ces conditions que les directeurs médicaux de crise de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris se préparent à trier les patients malgré la promesse de Macron de porter dans les prochains jours, la capacité des hôpitaux à 10 000 lits : «Dans cette situation de médecine de catastrophe où il y aura une discordance flagrante entre les besoins et les ressources disponibles, nous serons contraints de faire un tri des patients afin de sauver le plus de vies possibles. Ce tri concernera tous les patients, Covid et non Covid, en particulier pour l'accès des patients adultes aux soins critiques (…) Le tri des patients a déjà commencé puisque des déprogrammations médicales et chirurgicales importantes nous ont déjà été imposées et que nous savons pertinemment que celles-ci sont associées à des pertes de chances et des non-accès aux soins pour certains patients. Ces déprogrammations vont devoir s'intensifier dans les jours qui viennent» (5).

Les patients aujourd'hui en France risquent de mourir faute de moyens ! Une partie des malades sera ainsi sacrifiée sur l'autel de l'austérité. Car ce constat tragique est le résultat de décennies de politiques d'austérité et des processus de privatisation imposés par l'Union Européenne et appliqués avec zèle par les gouvernements successifs. L'hôpital public aujourd'hui manque de tout. Et c'est dans ces conditions que l'ensemble du personnel soignant affronte courageusement ce terrible virus. Et rien ne présage, malheureusement, la remise en cause de ces politiques (6).

 

Malgré cette situation sanitaire dramatique, Macron fait le fanfaron et assume sa «stratégie» :

«Nous avons eu raison de ne pas reconfiner la France à la fin du mois de janvier parce qu’il n’y a pas eu l’explosion qui était prévue par tous les modèles (…) Je peux vous affirmer que je n’ai aucun mea culpa à faire, aucun remords, aucun constat d'échec» (7).

 

Mais les faits sont têtus. Le virus est devenu hors contrôle dès le mois de mars 2021. Et Macron a été contraint d'intervenir à la télévision pour la septième fois. Il annonce avec une certaine mise en scène de nouvelles mesures qui ressemblent étrangement à celles déjà prises (8).

 

Après ce discours, comme après tous les autres, des hommes et des femmes vont mourir dans le silence pour que l'économie continue de tourner. Ils seront présentés non pas comme des personnes à part entière, mais comme des chiffres dans les statistiques des «autorités de santé».

Le profit s'est ainsi installé entre les vivants et les morts rendant leurs liens de plus en plus inhumains.

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/04/14/covid-19-en-france-la-barre-des-100-000-deces-est-deja-franchie-depuis-des-semaines_6076697_3244.html

(2) https://www.spdei.fr/wp-content/uploads/2020/05/Coronavirus-MINEFI-10032020.pdf

(3)https://gisanddata.maps.arcgis.com/apps/opsdashboard/index.html#/bda7594740fd40299423467b48e9ecf6

(4) https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2020/03/16/adresse-aux-francais-covid19

(5)https://www.lejdd.fr/Societe/Sante/exclusif-lalerte-de-41-medecins-face-a-la-crise-nous-serons-contraints-de-faire-un-tri-des-patients-4034448

(6)https://www.mediapart.fr/journal/economie/090421/pour-son-second-mandat-macron-promet-l-austerite?onglet=full

(7)https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/03/26/covid-emmanuel-macron-annonce-de-nouvelles-mesures-a-court-terme_6074489_823448.html

(8)https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/coronavirus-covid-19

 

 

 

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22 mars 2021 1 22 /03 /mars /2021 12:38

« Mon crime le plus grand est d'être une femme libre à une époque où l'on ne tolère que les esclaves.» N Al-Saadawi

 

Figure emblématique de l'émancipation des femmes, Nawal Al-Saadawi s'est éteinte le 21 mars 2021 au Caire à l'âge de 89 ans. Elle est née le 27 octobre 1931 près du Caire dans une famille musulmane de la bourgeoisie moyenne. Si elle a été excisée à l'âge de six ans, ses parents lui ont offert toutefois le privilège, réservé souvent dans cette Égypte traditionnelle aux garçons, d'accéder au savoir en l'inscrivant à l'école.

Nawal Al-Saadawi est diplômée de la faculté de médecine du Caire et de l'Université de Columbia à New-York où elle restera près de 10 ans. Médecin psychiatre, elle s'occupait des comportements névrotiques liés notamment à la sexualité.

Dès 1958, Al-Saadawi publie son premier roman Mémoires d’une femme docteur où elle dénonce entre autres les violences conjugales. En 1969 elle écrit La femme et le sexe qui lui coûtera sa place de directrice générale au ministère de la Santé et sera condamnée par toutes les autorités religieuses d’Égypte.

En 1982, Al-Saadawi créa l'Association de solidarité des femmes arabes (AWSA) qui sera dissoute par le gouvernement égyptien en 1991. En 1984, elle publie Mémoires de la prison des femmes et Douze femmes dans Kanater, où elle relate son expérience douloureuse de son séjour en prison : «C'est au cours de mon incarcération à la prison des femmes de Kanater, en septembre 1981, que m'est venu l'idée d'écrire une pièce sur mon expérience. Ce que j'étais en train de vivre dans cette salle commune, réservée aux détenues politiques, était unique pour moi. J'étais là, avec onze autres détenues, parce que Sadate avait décidé d'en finir avec toute l'opposition et de faire taire toutes les voix qui ne concordaient pas avec la sienne. C'est dans cette optique qu'il fit arrêter, le 2 septembre 1981, 1536 hommes et femmes de toutes les tendances politiques, considérés dangereux pour son régime.» (Kanater)

 

Cette femme courageuse qui ne s'est jamais reniée était combattue tant par le pouvoir politique que par les fanatiques religieux. Elle a «réussi» si l'on peut dire à faire l'unanimité contre elle.

Nawal Al-Saadawi a écrit au total une cinquantaine d'ouvrages en arabe et traduits dans plusieurs langues. Ses livres dénoncent tous non seulement le patriarcat, mais aussi le système qui le nourrit et l'entretient, le capitalisme. Dans La face cachée d’Eve, publié en 1982 elle écrivait : «Nous, femmes de pays arabes, réalisons que si nous sommes encore esclaves, encore opprimées, ce n’est pas parce que nous appartenons à l’Orient, ni parce que nous sommes arabes ou membres de sociétés musulmanes mais en vertu du système patriarcal de classe qui a dominé le monde depuis des centaines d’années».

 

Mohamed Belaali

 

 

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18 mars 2021 4 18 /03 /mars /2021 07:10

 

«L'histoire ne connaît pas encore d'exemple d'une pareille grandeur!»

K.Marx

 

 

«A l'aube du 18 mars, Paris fut réveillé par ce cri de tonnerre : vive la commune !» (1). Mais la Commune de Paris n'a vécu que 72 jours ! Pendant cette éphémère existence, la Commune n'a certes pas fait de miracles, mais elle a réalisé des avancées sociales et politiques qui font encore aujourd'hui l'admiration des peuples du monde entier. Des femmes de Montmartre, qui ont fait barrage de leurs corps pour protéger les canons de la Garde nationale, jusqu'au dernier communard tombé au Père-La chaise le fusil à la main, la Commune s'est battue héroïquement contre toutes les injustices et toutes les aliénations de l'ordre social établi. La commune fut battue mais ses principes restent éternels.

 

 

«Les prolétaires de la capitale, au milieu des défaillances et des trahisons des classes gouvernantes, ont compris que l'heure était arrivée pour eux de sauver la situation en prenant en main la direction des affaires publiques...en s'emparant du pouvoir» disait le manifeste du 18 mars du Comité central. La Commune a d'emblée supprimé deux instruments de domination de classe en abolissant la police et en remplaçant l'armée permanente par le peuple en arme. Les représentants de la Commune étaient non seulement tous élus au suffrage universel, mais surtout responsables et révocables à tout moment. Pour la Commune «les membres de l’assemblée municipale, sans cesse contrôlés, surveillés, discutés par l’opinion, sont révocables, comptables et responsables» (voir l'appel du 22 mars 1871). Quel contraste avec les hommes politiques d'aujourd'hui qui cumulent plusieurs mandats à la fois et n'ont de comptes à rendre à personne une fois élus; il s'agit d'une véritable confiscation du pouvoir ! Les citoyens n'ont aucun contrôle sur leurs représentants qui ne sont absolument pas tenus de respecter leurs promesses. Étrange démocratie où le peuple est réduit à voter à intervalles réguliers pour des «représentants» qui vont immédiatement le trahir. La Commune a instauré un traitement maximum de 6000 francs annuels pour tous les fonctionnaires du haut au bas de l'échelle y compris les juges et les magistrats c'est-à-dire l'équivalent d'un salaire d'ouvrier. Lorsque l'on pense aujourd'hui à ces hommes politiques corrompus qui confondent deniers publics et argent privé (2), on se rend vite compte combien la démocratie communale était en avance !

 

La majorité des élus de la Commune était naturellement des ouvriers à côté des autres élus du peuple. Aujourd'hui la démocratie bourgeoise ignore totalement dans sa représentation l'existence des ouvriers et des classes populaires en général alors même qu'elles représentent près de la moitié des producteurs de richesses. Qu'elle est jolie la démocratie «représentative» bourgeoise ! Mais ces ouvriers, que la bourgeoisie méprise tant, ont produit avec la Commune l'une des plus belles et des plus originales expériences politiques de l'histoire moderne.

 

La Commune a arraché l'enseignement à l'église et à l’État pour le mettre gratuitement entre les mains du peuple. Elle a banni de l'instruction publique tout «ce qui relève de la conscience individuelle de chacun». Dans «La guerre civile en France», Marx écrivait «La totalité des établissements d'instruction furent ouverts au peuple gratuitement, et, en même temps, débarrassés de toute ingérence de l'église et de l’État. Ainsi non seulement l'instruction était rendue accessible à tous mais la science elle-même était libérée des fers dont les préjugés de classe et le pouvoir gouvernemental l'avaient chargée».

 

Si aujourd'hui Macron et son ministre de l'intérieur Gérald Darmanin organisent la chasse policière aux étrangers, accablent de mille et une misères les travailleurs sans papiers et alimentent contre eux les préjugés les plus répugnants, les portes de la Commune, elles, étaient grandes ouvertes à des milliers de travailleurs du monde entier. Elle a même promu au rang de ministre du Travail un ouvrier hongrois et placé deux généraux polonais pour la défense de Paris dont un est mort sur les barricades. La Commune c'était la République universelle.

 

La colonne Vendôme, symbole des horreurs des guerres napoléoniennes, que le peuple de Paris ne voulait plus voir fut renversée. Ainsi le 12 avril 1871, la Commune vote le décret suivant, sur proposition de Felix Pyat : «La Commune de Paris, considérant que la colonne impériale de la place Vendôme est un monument de barbarie, un symbole de force brute et de fausse gloire, une affirmation du militarisme, une négation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuel à l’un des trois grands principes de la République française, la fraternité, décrète : article unique - La colonne Vendôme sera démolie».

 

Au cri «A bas la peine de mort», les citoyens du 11e arrondissement au milieu de la joie populaire, ont brûlé le 6 avril 1871 la guillotine. Il a fallu plus d'un siècle pour que la bourgeoisie concède l’abolition de cette pratique barbare.

Contre la justice marchandise, la Commune a tenté d'établir une justice égale et gratuite pour tous. Eugène Protot délégué à la justice avait proposé le 23 avril 1871 que les huissiers, notaires, commissaires-priseurs et greffiers de tribunaux soient des fonctionnaires appointés (3).

 

Rappelons que toutes les mesures de la Commune sont d'autant plus remarquables qu'elles étaient prises alors que Paris était assiégé par les prussiens et par les versaillais.

 

Même si les hommes et les femmes de la Commune n'ont pas atteint leurs objectifs, la portée de leur expérience reste immense. La beauté de l’œuvre de la Commune n'a d'égal que la laideur de l'ordre bourgeois. La Commune restera à jamais gravée dans la mémoire des ouvriers et des opprimés du monde entier.

 

Mohamed Belaali

 

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(1)K Marx, La guerre civile en France 1871, éditions sociales, page 59.

https://www.marxists.org/francais/ait/1871/05/km18710530c.htm

(2)http://www.belaali.com/2021/03/qu-elle-est-jolie-la-republique-bourgeoise.html

(3)https://maitron.fr/spip.php?article136007

 

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13 mars 2021 6 13 /03 /mars /2021 10:05

A l'occasion du 150ème anniversaire de La Commune, il est peut-être utile pour celles et ceux qui veulent comprendre cet événement historique exceptionnel et pour ne pas tomber dans les dénigrements, déformations et autres mensonges des vainqueurs, de lire «La Guerre civile en France 1871» de K Marx (1) et celui de Prosper-Olivier Lissagaray « Histoire de la Commune de 1871» (2).

La signification de la Commune ainsi que les causes de sa défaite ne peuvent être comprises qu'à travers une lecture politique. Et les deux écrits brillent non seulement par leur clarté et leur force de conviction, mais aussi par leur interprétation politique de la très brève existence de la Commune.

Certes, il existe une abondante et intéressante littérature sur la Commune, mais les ouvrages de Marx et de Lissagaray restent aujourd'hui encore inégalables.

 

«Ce qui est vrai de ces deux Adresses, disait Engels dans son introduction, l'est aussi de celle sur La Guerre civile en France. Le 28 mai, les derniers combattants de la Commune succombaient sous le nombre sur les pentes de Belleville, et deux jours après, le 30, Marx lisait déjà devant le Conseil général ce travail où la signification historique de la Commune de Paris est marquée en quelques traits vigoureux, mais si pénétrants, et surtout si vrais, qu'on en chercherait en vain l'équivalent dans l'ensemble de l'abondante littérature écrite sur ce sujet».

 

De cette guerre civile, Marx en a tiré comme à son habitude plusieurs conclusions notamment celles concernant l’État et l'émancipation des travailleurs : «la classe ouvrière ne peut pas se contenter de prendre tel quel l'appareil d'État et de le faire fonctionner pour son propre compte». Un peu plus loin, il ajoute «La classe ouvrière n'espérait pas des miracles de la Commune. Elle n'a pas d'utopies toutes faites à introduire par décret du peuple. Elle sait que pour réaliser sa propre émancipation, et avec elle cette forme de vie plus haute à laquelle tend irrésistiblement la société actuelle en vertu de son propre développement économique, elle aura à passer par de longues luttes, par toute une série de processus historiques, qui transformeront complètement les circonstances elles-mêmes».

 

 

Dans sa préface à la chronique de Lissagaray (1838-1901), acteur et témoin de la Commune, Jean Maitron écrit «Ainsi donc par l'objectivité de ses témoignages, par l'intelligence de ses conclusions, l’œuvre de Lissagaray constitue encore l'indispensable introduction à toute étude de l'événement».

Lissagaray avait publié à Bruxelles juste après la semaine sanglante «Les huit journées de mai derrière les barricades». Ce récit constitue le premier témoignage de cet événement aussi héroïque que tragique.

Jenny Marx dans une lettre à  Louis Kugelmann disait «À une seule exception près, tous les livres sur la Commune qui ont paru jusqu'à présent ne valent rien. Cette unique exception à la règle générale, c'est l'ouvrage de Lissagaray que vous recevrez en même temps que cette lettre».

 

Lissagaray a repris et remanié profondément ce texte après un long travail de recherches et d'enquêtes auprès des survivants et publie en 1876 «Histoire de la Commune de 1871» à Bruxelles. Le livre fut réédité à plusieurs reprises (4).

Voici un passage du chapitre VII :

«A côté de ces mandarins de la tribune, de l'histoire, du journalisme, incapables de trouver un mot, un geste de vie, voici les fils de la masse, innommés, abondants de volonté, de sève, d'éloquence. Leur adresse d'adieu fut digne de leur avènement : « Ne perdez pas de vue que les hommes qui vous serviront le mieux sont ceux que vous choisirez parmi vous, vivant de votre propre vie, souffrant des même maux. Défiez-vous autant des ambitieux que des parvenus... Défiez-vous également des parleurs... Évitez ceux que la fortune a favorisés, car, trop rarement celui qui possède la fortune est disposé à regarder le travailleur comme un frère...Portez vos préférences sur ceux qui ne brigueront pas vos suffrages. Le véritable mérite est modeste, et c'est aux travailleurs à connaître leurs hommes, et non à ceux-ci de se présenter». Lissagaray reste le grand historien de la Commune.

 

«La guerre civile en France», «Histoire de la Commune de 1871», deux livres sans équivalent sur un événement révolutionnaire qui a marqué l'histoire non seulement de la France, mais celle de toute l'humanité.

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.marxists.org/francais/engels/works/1891/03/fe18910318.htm

(2)http://classiques.uqac.ca/classiques/lissagaray_Prosper_Olivier/Histoire_Commune_1871/Histoire_Commune_1871.pdf

(3)https://www.marxists.org/francais/marx/works/00/kug/km_kug_18711221.htm

(4)https://maitron.fr/spip.php?article248694)

 

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8 mars 2021 1 08 /03 /mars /2021 06:31

«Qui n'a pas vu la révolution ne peut s'en imaginer la beauté majestueuse, triomphale.»

Nadejda Kroupskaïa

 

 

Si la figure de Lénine est bien connue, celle de sa compagne et camarade l'est beaucoup moins. En effet, Nadejda Kroupskaïa a vécu dans l'ombre du père de la Révolution d'octobre. Mais comme disait Clara Zetkin peut-on vraiment parler de Lénine sans évoquer sa femme :«Il est impossible de parler de lui sans penser à elle. Elle était la main droite de Lénine, son meilleur secrétaire, sa compagne dévouée, la meilleure interprète de ses idées» (1).

Il est vrai que l'histoire de la Révolution russe tend à ne retenir que des figures masculines. Or ce sont les grèves des ouvrières de textile de Petrograd (Saint-Pétersbourg aujourd'hui) qui ont enclenché la première révolution le 23 février 1917 (8 mars dans le calendrier Grégorien) qui a emporté le régime despotique des Tsars. Ce sont également des femmes comme Alexandra Kollontaï, Inessa Armand, Nadejda Kroupskaïa, pour ne citer que les plus connues, qui ont contribué directement et indirectement avec Clara Zetkin à l'organisation de «La journée internationale des femmes». Le 8 mars 1921, Lénine décrète une journée internationale des femmes en souvenir des ouvrières de textile de Saint-Pétersbourg.

Il est peut-être utile d'évoquer ici, même rapidement, la contribution de cette femme discrète au triomphe de la Révolution d'Octobre et son rôle pionnier dans le domaine de la pédagogie et de l'instruction au service de tous.

 

 

Kroupskaïa n'était pas seulement l'épouse et la collaboratrice de Lénine, elle était aussi une grande pédagogue (2). Avant la Révolution, Kroupskaïa avait déjà publié une quarantaine d'ouvrages, dont le plus important, intitulé «Instruction publique et démocratie» écrit en 1915 et publié en 1917. Elle a étudié et interprété les travaux de Comenius, Rousseau, Pestalozzi, Owen ou encore Dewey sans oublier les aspects développés par Marx et Engels dans le champs de la pédagogie (3).

 

Après la Révolution d'Octobre, l'immense tâche de liquider l'analphabétisme dans un pays où la majorité de la population était illettrée lui revenait tout naturellement : «La tâche, en effet, était des plus ardues. Une population presque exclusivement rurale, en majorité illettrée, des dizaines de milliers de hameaux perdus, incultes : tel était le milieu qu'il fallait pénétrer, instruire» (4).

 

Elle s'est attaquée également à la mainmise des classes possédantes sur l'instruction et la culture en général afin de permettre à tous d'accéder au savoir. L'école pour Kroupskaïa «ne peut se contenter d’apprendre aux élèves à lire, à écrire et à compter. Ils doivent maintenant connaître les éléments scientifiques de base sans lesquels ils seraient incapables de mener une vie consciente» (5).

 

Aujourd'hui encore, l'Unesco (United Nations Educational Scientific and Cultural Organization) octroie chaque année le Prix Kroupskaïa à tous les pays, organisations et personnes qui se sont distingués par leur lutte contre l’analphabétisme.

 

Nadejda Konstantinovna Kroupskaïa est née à Saint Pétersbourg le 14 février 1869 dans une famille progressiste. Elle est décédée à Moscou le 27 février 1939. Nadejda, comme beaucoup de révolutionnaires, appartenait à la petite noblesse russe. Dès 1890, la jeune Kroupskaïa adhère au cercle marxiste de Brousnev et passe une bonne partie de ses activités militantes à

l’alphabétisation des familles ouvrières en donnant des cours du soir dans les faubourgs industriels de Saint-Pétersbourg. La misère de la condition ouvrière n'a fait que renforcer ses convictions révolutionnaires.

En 1895 Kroupskaïa rejoint l’Union de lutte pour la libération de la classe ouvrière, fondée par Lénine qu'elle avait rencontré en 1894.

 

A la fin de 1895, Lénine est arrêté et exilé en Sibérie. Un peu plus tard, c'est au tour de Kroupskaïa d'être envoyée en exil, mais à des milliers de kilomètres de Lénine. Pour se rapprocher l'un de l'autre, ils décident de se marier. Après leur libération, le jeune couple s'exile à nouveau, mais cette fois à l'étranger. De Munich à Paris en passant par Zurich, Bruxelles et Londres, leur exil durera 17 ans.

 

Son dévouement a beaucoup aidé Lénine à supporter les déportations, la clandestinité et la vie pénible des révolutionnaires partout traqués par la police du Tsar, changeant sans cesse de pays, de villes et de logements. Kroupskaïa a probablement souffert davantage que Lénine des affres de l'exil. Elle menait de front plusieurs combats et plusieurs tâches. En plus de ses travaux scientifiques dans le domaine de la pédagogie qui embrassent tous les domaines de la politique éducative, elle consacrait une grande partie de son temps à la diffusion des brochures et documents du parti, combattait les ennemis de Lénine, engageait des luttes pour la cause des femmes etc. mais si «la vie n'était pas gaie» en exil, le retour du couple en Russie en avril 1917 a été triomphal : «Les masses, ouvriers, soldats, matelots, s'étaient portées au-devant de leur chef. Tout autour de nous, c'était une mer humaine qui bouillonnait. Qui n'a pas vu la révolution ne peut s'en imaginer la beauté majestueuse, triomphale» écrivait Nadejda Kroupskaïa dans «Souvenirs sur Lénine» (6).

 

Au crépuscule de sa vie, malade, affaibli et éloigné du pouvoir, Lénine pouvait encore et toujours compter sur sa plus fidèle camarade, Nadejda. C'est dire le rôle joué par cette femme dans la vie de Lénine et partant dans la révolution d'Octobre.

 

Le 21 janvier 1924, Lénine a cessé de vivre à l'âge de cinquante quatre ans après une lente agonie. On s'est empressé, contre la volonté de Kroupskaïa, d'embaumer son corps pour mieux enterrer ses idées révolutionnaires.

 

Après l'adieu officiel à Lénine, Nadejda Kroupskaïa prononça ces paroles : «Camarades, ouvriers et ouvrières, paysans et paysannes. Ne laissez pas votre peine se transformer en adoration extérieure de la personnalité de Vladimir Ilitch. Ne construisez pas de palais ou de monuments à son nom. A toutes ces choses, il accorda peu d'importance au cours de sa vie. Ça lui était même pénible.(...) Si vous voulez honorer la mémoire de Vladimir Ilitch, construisez des crèches, des jardins d'enfants, des maisons, des écoles, des hôpitaux, et mieux encore vivez en accord avec ses préceptes» (7). Son avertissement n'a pas été entendu.

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.marxists.org/francais/zetkin/works/1924/01/zetkin_19240100.htm

(2)http://dmz-ibe2-vm.unesco.org/sites/default/files/kroupskf.pdf

(3)Sur cet aspect, voir entre autres l'étude de Jacques Berchadsky : https://www.lecture.org/revues_livres/actes_lectures/AL/AL109/AL109_p022.pdf

 

(4)https://www.marxists.org/francais/kroupskaia/works/1920/12/formation.htm

(5)https://www.monde-diplomatique.fr/mav/131/POPELARD/54348

(6)https://www.marxists.org/francais/kroupskaia/works/1924/00/emigration.htm

(7)Cité dans Tariq Ali, «Les dilemmes de Lénine», Sabine Wespieser éditeur, 2017, page 459.

 

 

 

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5 mars 2021 5 05 /03 /mars /2021 09:25

 

Trafic d'influence, détournements de fonds publics, abus de faiblesse, favoritisme, escroquerie en bande organisée, corruption, enrichissement personnel, emplois fictifs, conflit d'intérêts, népotisme, malversation, fraudes en tout genre, etc. etc. Cette richesse dans le vocabulaire contraste tristement avec la misère morale et politique des dirigeants d'une République bourgeoise qualifiée pourtant «d'irréprochable» par les uns et « d'exemplaire» par les autres.

 

 

Un an de prison dont six mois ferme requis contre Nicolas Sarkozy dans l'affaire Bygmalion. L'ancien président de la République a déjà été condamné en première instance pour «corruption et trafic d'influence» à trois ans de prison dont un ferme dans le cadre «des écoutes de Paul Bismuth».

Mais ces deux affaires ne sont que l'arbre qui cache la forêt. Le nombre d'hommes politiques impliqués, à un degré ou à un autre, dans les affaires est impressionnant. Il est tout simplement impossible d'établir une quelconque liste exhaustive des scandales politico-financiers qui secouent régulièrement tous les échelons de l'Etat. Sans remonter jusqu'aux diamants centrafricains de Giscard, on peut citer à titre d'exemples quelques noms de dirigeants politiques empêtrés, à un titre ou à un autre, dans des affaires : Alain Carignon, Alain Juppé, Jérôme Cahuzac, Bernard Tapie, Patrick Balkany, Claude Guéant, Serge Dassault,Thomas Thévenoud, François de Rugy, Richard Ferrand, Jean-Paul Delevoye, Charles Pasqua, François Léotard, François Fillon, Jacques Chirac etc. etc. Il ne s'agit là que de quelques exemples qui ne doivent pas masquer le caractère récurrent et structurel de la corruption qui règne dans les plus hautes sphères de l’État. Les institutions de cette république bourgeoise non seulement sont complices de ces agissements, mais permettent et favorisent la multiplication des opportunités de corruption et des scandales en tout genre. Car les scandales financiers, corruption, privilèges et autres affaires, sont intimement liés au fonctionnement même du système capitaliste qui les produit et reproduit de manière permanente.

 

Quel contraste entre les valeurs proclamées par cette république bourgeoise et les pratiques réelles de ses dirigeants ! L'ancien président de la république Nicolas Sarkozy concentre à lui seul une demi douzaine d'affaires entre ses mains : l'affaire Tapie, l'affaire Karachi, l'affaire Bettencourt, l'affaire libyenne, l'affaire des sondages et l'affaire des écoutes téléphoniques pour laquelle il vient d'être condamné.

La corruption est au cœur de cette démocratie. Souvenons nous de Jérome Cahuzac lorsqu'il déclarait à l'Assemblée nationale et même « les yeux dans les yeux » devant François Hollande : «Je n'ai pas, et je n'ai jamais eu un compte à l'étranger, ni maintenant, ni avant» avant de reconnaître posséder un compte bancaire en Suisse et frauder le fisc quelques mois plus tard ! Le comble, c'est que Cahuzac était ministre du Budget et se présentait de surcroît comme le grand pourfendeur de l'évasion et de la fraude fiscale !

 

Que peuvent attendre encore les masses populaires de cette République bourgeoise dont les dirigeants possèdent de larges pouvoirs discrétionnaires qui leur procurent des privilèges matériels et symboliques pour leur propre compte ou pour celui de leur organisation politique ? Ces « bénéfices » sont en quelque sorte une récompense octroyée par la bourgeoisie à ses serviteurs zélés et dévoués.

Ce zèle et ce dévouement se traduisent concrètement par des politiques de paupérisation systématique des classes populaires et par l'enrichissement d'une minorité de puissants. Le chômage et la précarité, exacerbés par la pandémie et sa gestion irresponsable par Macron, explosent comme d'ailleurs les inégalités économiques et sociales. La destruction de l'économie de tout un pays se poursuit inlassablement.

 

On peut adopter les lois que l’on veut contre la corruption, les affaires et les privilèges, mener toutes les enquêtes possibles, on peut même diminuer et limiter leur importance, mais on ne peut pas les éliminer. Car leur existence et celle du capitalisme sont tellement imbriquées l’une dans l’autre que l’on ne peut supprimer l’une sans éliminer l’autre. Les lois et les mesures prises pour lutter contre la corruption ne sont que des paravents derrière lesquels la bourgeoisie dissimule ses forfaits. Le problème n’est donc pas l’existence de la corruption, des scandales financiers, des affaires et autres privilèges, mais celle du capitalisme qui les engendre. Il y a eu dans le passé des scandales, il y a aujourd’hui des scandales et il y aura dans l’avenir d’autres scandales tant que ce système existe. Le véritable scandale, c’est le capitalisme lui-même.

 

Mohamed Belaali

 

 

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22 janvier 2021 5 22 /01 /janvier /2021 07:26

 

A l'époque où le journalisme est devenu une vulgaire marchandise soumise aux vicissitudes du marché et un instrument de propagande entre les mains des puissants, il est utile de montrer à travers l'exemple de John Reed que cette profession peut être aussi un moyen au service des luttes sociales sans jamais renoncer à la vérité du terrain.

 

Le 17 octobre 1920 est décédé à Moscou, à l'âge de 33 ans, le journaliste révolutionnaire John Reed. L'auteur de l'inoubliable et magnifique des «Dix jours qui ébranlèrent le monde» est né dans une riche famille à Portland, en Oregon, le 22 octobre 1887. Son grand-père a fait fortune dans le commerce des fourrures, son père dans la vente à grande échelle de matériel agricole. Diplômé de Harvard qu'il quitte en 1910, il rejoint en 1913 The Masses, magazine progressiste à la fois politique et culturel. Il couvre alors une série de grèves ouvrières comme celle des travailleurs de la soie dans la ville de Paterson dans le New Jersey. Dans «Guerre à Paterson», il écrit : «Il y a la guerre à Paterson. Mais c'est une sorte de guerre curieuse. Toute la violence est l'œuvre d'un seul côté - les propriétaires de l'usine» (1).

 

Ses témoignages sur les combats ouvriers lui ont valu des séjours répétés dans les prisons fédérales.

Cette première rencontre avec des travailleurs en grève lui a au moins permis de comprendre que le journalisme peut être un moyen efficace au service des luttes sociales non seulement aux États-Unis mais partout à travers le monde.

 

Quelques temps après, John Reed part pour le Mexique afin de couvrir pour Metropolitan Magazine de New York la révolution mexicaine menée par PanchoVilla. Le témoignage de Reed sur ce soulèvement populaire porte sur une courte période (quatre mois). Mais c'est peut-être la période la plus intense, la plus chargée d'espoir où Pancho Villa est considéré déjà comme une légende vivante. Dans ses chroniques, Reed mêle à la fois le souci d'une information objective et sa profonde sympathie pour les insurgés mexicains. En 1914 John Reed fait paraître « Le Mexique insurgé», somme d'articles et chroniques de cette expérience mexicaine : «Il y a du souffle et du mouvement dans les vastes fresques où sont représentées les multitudes en armes, les chevauchées, les rencontres ou les batailles. On trouvera aussi dans ces pages de saisissants portraits d'humbles paysans, de combattants anonymes et, au premier plan, la fascinante figure du paladin invincible Francisco Villa» (2). Une adaptation partielle du livre de Reed est portée à l'écran en 1973 par Paul Leduc : «Reed, Mexico Insurgente» (3).

 

En juillet 1914 toujours dans Metropolitan, Reed publie une longue lettre «The Colorado War» où il décrit avec minutie la grève et le massacre de Ludlow dans le sud du Colorado. Vingt-six ouvriers et leurs familles ont été abattus à la mitrailleuse par la garde nationale et les hommes de Rockefeller. L'historien Howard Zinn dit de cette grève des mineurs qu'elle fut «l'un des plus durs et des plus violents conflits entre les travailleurs et le capital industriel de l'histoire des États-Unis» (4)

 

Lorsque la Première Guerre mondiale éclate en Europe, Reed est déjà sur place. Dans son article « The Traders’ War» publié dans The Masses en septembre 1914, John Reed explique que cette boucherie reflète en réalité les rivalités commerciales entre l'Angleterre, La France et l'Allemagne : «Les capitalistes allemands veulent plus de profits. Les capitalistes anglais et français veulent tout. Cette guerre commerciale dure depuis des années» (5).

 

Mais c'est surtout sa rencontre avec la révolution d'octobre 1917 qui va révéler les qualités journalistiques de Reed. Dans son magnifique livre les «Dix jours qui ébranlèrent le monde», il décrit avec passion et enthousiasme les événements historiques qui vont changer la face du monde. Il a su capter et transmettre les revendications et les aspirations humaines les plus simples et les plus fondamentales des ouvriers, des soldats et des paysans russes : «la paix, la terre, le pain, la fraternité, tout le pouvoir aux soviets...». Voici comment Reed décrit les premiers moments de la Révolution : «Quelque chose s’était brusquement éveillé en tous ces hommes. L’un parlait de la révolution mondiale en marche, un autre de l’ère nouvelle de fraternité, où tous les peuples ne seront plus qu’une grande famille (…) Mus par une commune impulsion, nous nous trouvâmes soudain tous debout, joignant des voix dans l’unisson et le lent crescendo de l’Internationale. Un vieux soldat grisonnant sanglotait comme un enfant. Alexandra Kollontaï rentrait ses larmes. Le chant roulait puissamment à travers la salle, ébranlant les fenêtres et les portes et allant se perdre dans le calme du ciel» (6).

 

 

Son ami Albert Rhys Williams disait que «La Révolution russe s'était emparée de lui corps et âme (…) elle l'avait envoyé, comme une sorte de prophète au flambeau embrasé, dans les villes d'Amérique.» (7).

 

Reed ne se contente pas seulement de rapporter des faits au jour le jour, il prend résolument partie pour les révolutionnaires. Il est à la fois témoin consciencieux et acteur de cette immense révolution : «Au cours de la lutte, mes sympathies n'étaient pas neutres écrit-il. Mais, en retraçant l'histoire de ces grandes journées, j'ai voulu considérer les événements en chroniqueurs consciencieux, qui s'efforce de fixer la vérité» (8). L’œuvre de Reed «apporte la preuve éclatante que l'art rigoureux du journaliste s'enrichit de la passion du militant pour atteindre à une vérité profonde : on voudrait aujourd'hui le nier. Elle exalte enfin le goût de la révolte, du refus et de la lutte, que l'on déclare aujourd'hui, bêtement, enterré. Il y aura toujours des jeunes gens qui, un jour, se mettront en colère» (9).

 

Dans la préface du livre de Reed, Lénine écrivait : «Après avoir lu avec un immense intérêt et la même attention jusqu'au bout le livre de John Reed, Dix jours qui ébranlèrent le monde, je recommande du fond du cœur cette œuvre aux ouvriers de tous les pays. Je voudrais que ce livre soit répandu à des millions d'exemplaires et traduit dans toutes les langues, car il donne un tableau exact et extraordinairement vivant d'événements qui ont une si grande importance pour comprendre ce qu'est la révolution prolétarienne, ce qu'est la dictature du prolétariat» (10).

 

La vie de Reed et les « Dix jours qui ébranlèrent le monde » sont portés à l'écran en 1981 par Warren Beatty. « Reds », ce passionnant film avec Diane Keaton et Jack Nicholson, entre autres, a largement contribué à faire connaître au grand public le journaliste et révolutionnaire John Reed.

 

Le 17 octobre 1920, John reed le journaliste, le révolutionnaire et l'internationaliste s'est éteint à l'hôpital Marinski de Moscou emporté à l'âge de 33 ans par le typhus. Il repose à coté d'autres révolutionnaires sur la Place Rouge contre le mur du Kremlin. Sur sa tombe on peut lire « John Reed, délégué à la IIIe Internationale, 1920 ».

 

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.marxists.org/archive/reed/1913/masses06.htm

(2)https://www.persee.fr/docAsPDF/carav_00080152_1975_num_25_1_1998_t1_0197_0000_3.pdf

(3)https://fr.wikipedia.org/wiki/John_Reed,_Mexico_insurgente

(4)Howard Zinn, « Une histoire populaire des États-Unis », Agone, 2002, p. 403

(5)https://www.marxists.org/archive/reed/ttw.htm

(6) «Dix jours qui ébranlèrent le monde. Éditions Tribord, 2010, pages 228/229

(7)Biographie de John Reed. Éditions Tribord, op cit page 19/20.

(8) John Reed, «Les dix jours qui ébranlèrent le monde», page 33

(9)http://www.jprissoan-histoirepolitique.com/articles/histoire-d-ailleurs/russie---urss/johnreeddixjoursquiebranlerentlemondeunebiographie

(10)John Reed, « Dix jours qui ébranlèrent le monde », page 25.

 

 

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13 janvier 2021 3 13 /01 /janvier /2021 10:21

 

« L’histoire a voulu qu’ils partent le même jour », c’est l’hommage du ministère des Affaires Étrangères de Cuba à la mort de Maradona, ce mercredi 25 novembre 2020, quatre ans jour pour jour après celle de Castro. Hé oui ! Même si vous n’aimez pas le football, ce n’est pas une raison pour ne pas avoir de l’affection pour Maradona…

 

Avec notre spectacle Futsal et mains propres, nous nous sommes intéressés au football et aux liens qui pouvaient exister entre le foot et la politique… Maradona, à la fois Dieu du foot, socialiste, anti-impérialiste et anti-colonialiste convaincu, est un peu la synthèse de tout cela.

 

Exemple mythique : dans le documentaire d’Emir Kusturica, « Maradona par Kusturica », il raconte cette force qui porte les joueurs de son équipe lors de ce fameux match Argentine-Angleterre du 22 juin 1986. Quatre ans après la Guerre des Malouine où le peuple argentin a été pris entre la dictature et une puissance coloniale, ils avaient une terrible envie de rendre hommage aux morts et de donner un peu de réconfort à leur famille : « Nous les joueurs, on représentait nos morts. Notre objectif à nous c’était d’entrer sur le terrain et de jouer au ballon tout en ayant conscience que si on sortait l’Angleterre, on gagnait la guerre du football. Voilà où on a puisé notre énergie. » Alors contre toute attente, il marque deux buts extraordinaires, mythiques, et élimine l’Angleterre en quart de finale de la Coupe du Monde.

 

Ces convictions, il les a mises en pratique dans le milieu du football où il a lutté sans relâche contre la corruption au sein de la Fédération Internationale (FIFA) qu’il comparait à une mafia. Il s’est battu pour syndiquer les autres joueurs et, à la fin des années 90, avec d’autres stars, il crée l’Association Internationale des Joueurs de Football Professionnels pour défendre leurs droits.

 

En tant que socialiste et anti-impérialiste, paré des tatouages du Che et de Castro, Maradona a été un partisan engagé de la révolution bolivarienne du Venezuela, de celle de Cuba et des mouvements sociaux progressistes à travers l’Amérique Latine, ne perdant jamais l’espoir que les pauvres et les opprimés s’émancipent. Il était un ami proche et un partisan d’Hugo Chavez, d’Evo Morales et de Fidel Castro, ainsi que d’autres dirigeants socialistes. Il a dit un jour : « Je crois en Hugo Chávez. Je suis chaviste. Tout ce que lui et Fidel font, de mon point de vue, c’est ce qu’il y a de mieux ».

 

«Il faut que les gens sachent que nous disons la vérité, que nous voulons l’égalité et que nous ne voulons pas que le drapeau yankee flotte sur nous. » Il a aussi défié ouvertement l’impérialisme et le colonialisme, notamment en 2005 en participant, aux côtés de 150 personnalités dont Hugo Chavez et le futur président bolivien Evo Morales, au contre-sommet de Mar del Plata où il a appelé la foule à « virer » Bush d’Argentine.

 

Fervent défenseur de la cause palestinienne, il a déclaré « dans mon cœur je suis palestinien » et « je suis un défenseur du peuple palestinien, je le respecte et je sympathise avec lui, je soutiens la Palestine sans crainte ».

 

Vénéré comme un dieu en Argentine et en Italie, il n’a jamais oublié d’où il venait.

Alors, comme disent les anti-impérialistes d’Amérique : « Rest in power ».

 

Compagnie Jolie Môme

 

Sources : Redfish, Lapresse.ca et l’Huma

 

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